Communiqués de presse

Communiqué de l’Institut Pasteur de Madagascar – A propos des 67 cas de COVID-19 signalés le 6 mai 2020

Depuis quelques jours, certains médias font état de critiques parfois très vives envers l’Institut Pasteur de Madagascar (IPM), suite aux 67 cas de COVID-19 qu’il a signalés aux autorités de santé dans le cadre de la surveillance épidémiologique de cette maladie.

L’Institut souhaite apporter les précisions et éclairages suivants.

Depuis sa création, l’PM a toujours eu pour vocation d’appuyer le Ministère de la Santé Publique de Madagascar (MSP) dans la surveillance des maladies infectieuses au bénéfice de la population Malagasy. Notre expertise est ainsi centrée sur la recherche et la santé publique, et nous œuvrons sans cesse pour diagnostiquer rapidement toute épidémie d’importance pour la santé de la population.

Nous sommes aujourd’hui très affectés par cette situation complètement inhabituelle et pensons en premier lieu, aux patients ayant eu un test « faussement positif », ainsi qu’à leur famille. Nous avons aussi une pensée particulière à l’endroit de tout le personnel de santé qui a dû faire à cet afflux important de patients tout en restant très professionnel.

Par respect et compassion envers les personnes affectées, et par souci de transparence envers la population, l’IPM a jugé important de présenter les principaux résultats de l’enquête interne menée suite au signalement de 67 cas trouvés positifs au COVID-19.

La journée du 6 mai 2020

La journée du 6 mai, l’IPM a signalé 67 nouveaux cas de COVID-19 aux autorités (MSP et Présidence), soit un nombre de cas confirmés plus importants que les jours précédents (32 cas à midi et 35 le soir sur 252 tests réalisés). L’IPM a bien signalé cette singularité et a indiqué avoir vérifié 4 fois, par trois techniques différentes, la première série de 32 cas.

Les équipes de l’IPM étaient bien conscientes que ce nombre de cas était plus élevé que d’ordinaire. Au vu de l’importance de la prise en charge rapide des patients, et de la prévention de la transmission communautaire, l’IPM a décidé de transmettre les résultats aux cliniciens et aux autorités (MSP et Présidence). Cette décision était justifiée par le fait que certains de ces patients présentaient des signes évocateurs du COVID-19 (détresse respiratoire, perte de l’odorat…) ou étaient des contacts de cas confirmés.

Parallèlement, la Direction de l’IPM a ordonné une investigation en interne dès le 7 mai, avant toute rencontre avec quelques autorités. A l’initiative de l’IPM, des experts du Ministère de la santé publique ont été invités afin qu’ils puissent se rendre compte des procédures mises en place au sein du laboratoire effectuant le diagnostic virologique du COVID-19 (présence à l’IPM le mercredi 13 mai).

Résultats des investigations

Contrairement à notre laboratoire d’analyses médicales, qui a en charge tout le processus de réalisation du prélèvement au résultat, l’IPM ne réalise pas les prélèvements chez les patients suspects de COVID-19. De ce fait, le laboratoire n’a pas de responsabilité des conditions de réalisation et de transport des échantillons.

Cette investigation n’a démontré aucune défaillance dans les processus d’analyses effectuées à l’IPM et confirmé que le personnel ayant eu en charge le traitement des échantillons était compétent pour les techniques de diagnostic utilisées (formation, habilitation, expérience).

Une analyse rétrospective des résultats a suggéré une possible contamination involontaire d’une série d’échantillons du fait de la présence d’une charge virale exceptionnellement élevée dans le prélèvement d’un patient. Cette charge virale exceptionnelle a pu impacter toute la chaine depuis le prélèvement dans la structure de santé jusqu’aux analyses de laboratoire de la série des 67 prélèvements traités du 4 au 5 mai 2020. Un second prélèvement effectué le 7 mai chez ce même patient, a d’ailleurs été confirmé positif à la fois par le Centre d’Infectiologie Charles Mérieux (CCIM) et l’IPM.

Par ailleurs, des analyses PCR réalisées sur une deuxième série d’échantillons issus de 55 patients (sur les 67) re-prélevés du 7 au 10 mai, en l’absence de l’IPM et selon des conditions qui pourraient avoir été différentes de la première série, ont montré des résultats en totale concordance entre le CICM et l’IPM et ont confirmé la fiabilité des résultats obtenus par l’IPM.

En conclusion, notre investigation n’a pas révélé de dysfonctionnement dans le processus de diagnostic du coronavirus à l’IPM et a montré que les conditions d’hygiène et de sécurité étaient respectées. Un échantillon d’une charge virale exceptionnelle a pu impacter les résultats obtenus en contaminant des échantillons prélevés ou traités concomitamment.

Nous adressons une fois de plus nos pensées les plus sincères aux patients et personnels de santé affectés par cette situation particulière. Bien que cet évènement est indépendant de la volonté de l’IPM et ne peut totalement être exclu de la vie des laboratoires, nous présentons nos plus sincères regrets à ceux qui ont pu souffrir de cette situation. Nous souhaitons que cet épisode n’altère pas la confiance envers une institution plus que centenaire et qui a comme seul objectif de participer à améliorer la santé des populations.

Antananarivo, le 15 mai 2020

Pr André SPIEGEL

Directeur de l’Institut Pasteur de Madagascar

Contexte de l’épidémie de COVID-19

L’Unité de virologie de l’Institut a été l’une des premières équipes en Afrique à pouvoir détecter, par PCR dès le 29 janvier 2020, le nouveau coronavirus (SARS-CoV-2). Madagascar a été ainsi l’un des pays ayant pu très tôt disposer de cet outil indispensable dans la riposte contre le COVID-19. A ce jour l’IPM a réalisé à titre gracieux, dans le cadre de sa mission en santé publique plus de 5 000 PCR.

De plus, afin de faciliter la prise en charge des patients, l’IPM a :

  • déployé son laboratoire mobile à Toamasina afin de rapprocher les capacités diagnostiques des patients ;
  • mobilisé ses équipes 7 jours sur 7,
  • augmenté ses capacités journalières de tests (200-300/jour)
  • formé à la demande du Ministère de la santé publique, et grâce au financement de l’OMS, des biologistes et techniciens de 3 hôpitaux de province (Fianarantsoa, Mahajanga et Toamasina) et différents centres à Antananarivo (Centre Hospitalier Universitaire Joseph Ravoahangy Andrianavalona, Centre d’Infectiologie Charles Mérieux et le Laboratoire de l’Institut National de Recherche en Santé Publique).