IMI-Cysti-Antanifotsy Evaluation de l’impact d’une campagne de traitement de masse des populations du district d’Antanifotsy pour lutter contre la téniase/cysticercose

Contexte et justification

L’homme est le seul hôte définitif connu du ver solitaire (Taenia solium) responsable de la téniasis humaine. La cysticercose chez l’homme est due à l’ingestion des œufs de T. solium contenus dans les excréments humains contaminant les mains et les aliments. A Madagascar, plus de 15% de la population est touchée par cette pathologie. Dans le cadre de l’approche intégrée dans la lutte contre les Maladies Tropicales et zoonoses Négligées (MTN), l’initiative mondiale vise à accélérer la mise en place des stratégies de lutte afin de prévenir, contrôler et éliminer certaines pathologies parasitaires dont la cysticercose d’ici 2020. Madagascar figure parmi les pays sélectionnés pour bénéficier des appuis internationaux et régionaux en matière de lutte contre les infections à T. solium (téniasis et cysticercose) (OMS 2015). En Septembre 2014, une plateforme multisectorielle a été initiée par l’OMS au niveau international et national avec la mise en place d’un comité national de lutte contre la téniase/cysticercose impliquant la santé humaine (Ministère de la Santé Publique, Département des MTN), la santé animale (Ministère de l’Elevage) et différentes Institutions de recherches (Institut Pasteur de Madagascar et CIRAD).

Dans ce cadre, un projet pilote de lutte contre la téniase/cysticercose dans trois communes (d’Ambatolahy, d’Ambohitompoina et d’Antsahalava) du district d’Antanifotsy a été élaboré. En effet, les résultats des analyses coprologiques obtenus par le “Programme Schistosomiase” lors des récentes enquêtes menées sur l’évaluation de la prévalence de la schistosomiase et des géohelminthiases à Madagascar ont montré des prévalences du portage en Taenia allant de 2,7 %  à 19,2 % dans les communes d’Ambatolahy, d’Ambohitompoina et d’Antsahalava.

Objectifs

L’objectif général de ce projet pilote de contrôle des infections à T. solium dans le district d’Antanifotsy est de réduire la prévalence de la téniase à moins de 1% dans la population de trois communes ciblées (Ambatolahy, Ambohitompoina et Antsahalava) du district sanitaire d’Antanifotsy à travers un programme de traitement médicamenteux de masse (TMM) et d’éducation des populations (voir site OMS : http://www.who.int/features/2016/madagascar-halting-tapeworm/fr/ ).

Ce projet pilote s’articule autour de trois volets:

  • L’administration annuelle de médicaments anti-téniase (Praziquantel, 10mg/Kg) en ciblant au minimum 90% de la population âgée de plus de 5 ans ;
  • La sensibilisation de la population aux parasitoses à solium, aux maladies qui en découlent et aux mesures de prévention et de traitement ;
  • L’évaluation de l’impact du TMM en mesurant la prévalence de la téniase chez l’humain et de la cysticercose chez les porcs.

Ce rapport d’activité concerne le volet 3 du projet et plus particulièrement l’analyse de la prévalence de la cysticercose chez les porcs.

Méthodes

Après un recensement de la population vivant dans les 3 communes ciblées, la prévalence de la téniase humaine a été évaluée avant l’administration du TMM et une étude de la prévalence de la cysticercose porcine a été réalisée un an après la première campagne de TMM à partir de sérums de porcs. Les analyses sérologiques ont été réalisées en utilisant les techniques de référence (ELISA et EITB/Western Blot) basées sur la détection d’anticorps (IgG) dirigés contre les antigènes de T. solium. Ces techniques utilisent des glycoprotéines membranaires natives extraites des cysticerques de T. solium et purifiées par chromatographie d’affinité sur résine de Concavaline A (extrait antigènique CS50, Tsang et al., 1989). Pour s’affranchir des réactivités croisées et non spécifiques rencontrées chez des porcs non-infectés ou atteints d’autres pathologies parasitaires comme la Trichinellose, une étape de purification supplémentaire par électrophorèse puis électro-élution des glycoprotéines d’intérêt de masse moléculaire < 30kDa a été réalisée. L’antigène ainsi obtenu nommé CS50-électroéluée a été utilisé pour l’ELISA, le Western Blot a été réalisé avec la CS50 de référence.

Dans un premier temps, les anticorps sériques circulants anti-T. solium ont été analysés par ELISA pour détecter les porcs ayant eu un contact avec le parasite. Dans un second temps, les sérums de porcs positifs en ELISA ont été analysés par Western Blot/EITB afin d’identifier les porcs ayant développé une cysticercose porcine.

Résultats et discussion

Au total 744 sérums de porcs ont été reçus. Les analyses effectuées chez le porc ont permis de détecter une séroprévalence des anticorps anti-T. solium de 23,25% (IC95%, 20,21-26,30) par ELISA et de confirmer une cysticercose par Western blot chez 16,13% (IC 95% 13,48-18,78) des porcs. Les analyses par communes et villages (fokontany) sont en cours. La prévalence de la cysticercose porcine sera également analysée en 2018, un an après la réalisation de la troisième campagne de TMM.

Impact

En plus du traitement de la population afin de réduire et contrôler les infections à T. solium dans la zone d’étude, le projet pilote aura des répercussions positives sur le développement des stratégies et des outils nécessaires à la lutte contre T. solium à Madagascar. Ce projet pilote a initié et soutenu le  développement d’outils de communication pour la sensibilisation des communautés et la formation technique de membres des laboratoires de l’Institut Pasteur de Madagascar et du Centre Hospitalier Universitaire CHUJRA. Ce projet devrait également permettre d’accroître les connaissances sur la prévalence de la téniase dans les communautés rurales et sur les facteurs de risques liés à la cysticercose porcine et humaine afin d’établir des stratégies de lutte en étroite collaboration avec la Direction des Services Vétérinaires. Au niveau local, le projet favorisera aussi la mise en place de comités locaux de surveillance communautaire fonctionnelle au niveau du district d’Antanifotsy. Enfin, les mesures de prévalence, avant et après traitement dans les populations humaine et porcine, permettront d’évaluer l’impact du projet.