Peste-FAS Peste asymptomatique et rôle du système immunitaire de l’hôte

Contexte et justification

La peste est  une maladie  grave avec une létalité élevée chez les humains. Plusieurs arguments passés et récents suggèrent que les formes asymptomatiques de la peste peuvent exister, mais ces formes possibles sont rares, inconnues ou ignorées. Madagascar déclare chaque année des cas de peste humaine grâce à son système de surveillance fonctionnel et efficace. Madagascar est donc probablement le meilleur endroit au monde pour déterminer l’existence et la fréquence des formes sub-cliniques. Par ailleurs,  la réponse immunitaire contre Yersinia pestis  a été jusqu’à présent peu étudiée chez l’homme. Etant donné que les réponses peuvent varier en fonction du contexte épidémiologique, étendre l’étude aux foyers pesteux du Brésil (un foyer de peste qui apparaît actuellement silencieux) et du Pérou (situation intermédiaire entre Madagascar et le Brésil) pourrait accroître l’intérêt des résultats de cette étude.

Objectifs

  • Déterminer l’existence de formes asymptomatiques de peste.
  • Caractériser la réponse immunitaire humorale et cellulaire contre pestis chez les humains asymptomatiques exposés à la peste et la comparer à celle des cas confirmés de peste.
  • Confirmer la circulation de pestis dans la population murine.

Méthodes

La recherche de la forme asymptomatique de la peste a commencé par l’identification d’individus sans antécédent d’infection pesteuse, mais porteurs d’anticorps contre la peste. Les sites d’études à Madagascar sont les fokontany: Ankazobe I, Amparaky et Miandrarivo.

  • Des paires de sérum ont été collectées sur chaque participant tiré au sort: un avant la saison de haute transmission de la peste et un autre après la saison. Une séroconversion (anticorps IgG anti-F1) au cours de cette période, sans signe clinique de peste évoque une infection asymptomatique.
  • D’autres techniques de confirmation (ELISA et Western blot) ont été développées pour éliminer les faux positifs en raison des réactions croisées entre l’antigène F1 et les antigènes non-pestis, en utilisant d’autres antigènes spécifiques de pestis (IP Paris).
  • La réactivité du système immunitaire contre pestis a été évaluée par l’étude de la réponse cellulaire des personnes qui ont présenté une séroconversion.

Par ailleurs, des captures de rongeurs ont été menées dans chaque site d’étude suivant le protocole de capture standard de l’IPM (avril à mai 2015). Deux types de pièges (BTS et Sherman) ont été déposés à l’intérieur des maisons et dans les champs pendant 3 nuits successives, et les rongeurs capturés ont été identifiés, épucés, disséqués et prélevés..

Résultats et discussion

Douze personnes ont été identifiées comme étant des cas asymptomatiques de peste après tests sérologiques (séroconversion négatif- positif) et analyse des facteurs d’exposition à la peste. Si chez les cas pesteux, deux groupes d’individus ont pu être retrouvés selon la valeur de la densité optique(DO) avec le test ELISA de détections des anticorps IgG anti-F1, «fort-répondeurs» (DO>1) et « faible répondeurs » (DO<1) (Rasoamanana et al., 1997), csl cas asymptomatiques faisaient partie des «faible-répondeurs». Le développement d’autres techniques de confirmation par IP Paris n’a pas pu aboutir à des résultats satisfaisants mais le test ELISA par inhibition avec l’antigène a pu confirmer autrement la spécificité de ces anticorps anti-F1..

Les résultats obtenus chez les  rongeurs capturés dans chaque site ont montré que la séroprévalence par site était de 5% pour Miandrarivo et Ankazobe, et de 2% pour Amparaky. Ces séroprévalences ainsi que la détection de rares individus positifs au test de diagnostic rapide de l’antigène F1 (TDRA) confirment une circulation à bas bruit de Y. pestis chez les rats des sites d’étude du projet.

Impact

Ce projet a permis d’apporter plus d’informations sur les différentes formes cliniques de la peste dont les cas asymptomatiques de peste ainsi que le type de réponse immunitaire qu’ils peuvent développer. A ce stade de l’étude, on ne peut pas encore conclure si les cas asymptomatiques sont des contacts infectieux qui se transformeraient en maladie ou s’ils présentent juste une immunité silencieuse.