Palu-Plante-VITRO Amélioration des tests in vitro pour évaluer l’activité antiplasmodiale des remèdes antipaludiques

Contexte et justification

Le paludisme est endémique à Madagascar et masqué sous l’appellation générique « tazo » (fièvre, fatigue, douleur musculaire et articulaire). Dans la pratique traditionnelle, le paludisme (et/ou des symptômes de paludisme) est couramment traité par décoctions ou infusions de plantes. Pour mettre en place des tests in vitro permettant d’évaluer l’activité des tisanes, nous avons amélioré les tests Mark III de l’OMS/2001 et « Ring Stage Survival Assay » ou RSSA après plusieurs essais.

Objectifs

Mettre en place le protocole d’évaluation des activités antipaludiques des extraits de plantes in vitro vis à vis de P. falciparum FCM 29.

Méthodes

Le clone P. falciparum FCM29 – maintenu en culture continue selon la méthode de Trager et Jensen (1976) pendant au moins 10 jours, est utilisé. On maintient la culture à une parasitémie inférieure 5%. La modification que nous apportons réside dans la synchronisation des parasites afin d’avoir des « ring » de moins de 3h au moment de lancer le test. A J-96h, on synchronise la culture pour sélectionner des « ring ». On recommence la synchronisation à J-48h. A partir de J-3h, on surveille sur frottis toutes les heures le début de ré-invasion des mérozoïtes, et on effectue la dernière synchronisation deux heures après la détection des premiers « ring ». Pour rester proche de l’utilisation empirique, on teste une série de six dilutions de tisane. La préparation de tisane est standardisée (6 g de matière végétale dans 40 ml d’eau distillée).

Pour le test MarkIII, on utilise une parasitémie initiale de 0,5%. La durée de l’incubation à 37°C dans une atmosphère humide avec 5% d’O2, 5% de CO2 et 90% de N2 est réduite à 20h (et non pas 24h). L’évaluation consiste à comparer l’inhibition de la croissance des schizontes par les différentes concentrations d’extraits de plantes par rapport au témoin (puits contrôles sans extraits de plantes). 50 champs microscopiques sont examinés. La Concentration Inhibitrice à 50% (CI50) est calculée pour évaluer l’activité antiplasmodiale des produits testés en prenant comme référence (100% de maturation de schizonte) les puits contrôles. Pour le test RSSA, on part de la même suspension parasitaire triplement synchronisée décrite in supra. On teste les mêmes dilutions de tisanes. On incube les plaques de cultures à 37°C dans une atmosphère humide avec 5% d’O2, 5% de CO2 et 90% de N2. Après 6h d’incubation, le contenu de chaque puits de culture est récupéré dans un tube stérile, centrifugé à 800 g pendant 2 minutes puis lavé avec 9 ml de milieu RPMI deux fois. Le culot de globules rouges est suspendu dans 1 ml de milieu de culture RPSH-10% préchauffé à 37°C, et remis dans un puits d’une nouvelle plaque de culture. On incube les plaques dans les mêmes conditions précédemment décrites pendant 66 heures. Pour déterminer le pourcentage de parasites viables à 72h (survie à 72h), sont examinés le frottis INI pour définir la parasitémie initiale au début du test et les frottis TEST pour définir la parasitémie des puits contrôles (sans produits) et celle des puits contenant les extraits testés. 50 champs microscopiques sont examinés. La CI50 est calculée pour évaluer l’activité antiplasmodiale des produits testés en prenant comme référence (100% de viabilité) les puits contrôles Cinchona ledgeriana – l’arbre qui donne la quinine et planté à Madagascar, est utilisé comme comparateur. Pour les deux méthodes, la CI50 pour chaque produit testé est calculée avec une méthode établie au sein de l’unité depuis plusieurs années. Le niveau d’activité relative des extraits est calculé par rapport à la CI50 de C. ledgeriana. Les tisanes de G. malagasy (utilisée dans le sud de Madagascar pour traiter le tazo); de Cedrelopsis grevei (utilisée dans différentes régions de Madagascar pour traiter le tazo); d’un mélange de plantes que nous codons H22 (vendu en supermarché et clairement indiqué pour traiter le paludisme) ont été testées.

Résultats et discussion

Les premiers résultats sont résumés dans le tableau 1. Le niveau d’activité relative de C. ledgeriana par rapport aux extraits est le rapport CI50 Extrait/ CI50 C. ledgeriana.

Tableau 1 : Activités anti-plasmodiales des tisanes contre P. falciparum FCM29

Tisanes testées CI50 (μg/ml) Activité relative de C. ledgeriana
Cinchona ledgeriana 0,13 ± 0,06 1
Gonioma malagasy 1,14 ± 0,27 9
Cedrelopsis grevei 4,83 ± 2,64 38
H22 105,3 ± 29,3 830
Cinchona ledgeriana 1,04 ± 0,22 1
Gonioma malagasy 2,32 ± 0,20 2
Cedrelopsis grevei 2,73 ± 0,20 3
H22 17,24 ± 1,74 17

2a : Résultats du test Mark III (n = 3)

2b : Résultats du test RSSA (n = 3)

H22 est 830 fois moins actif que C. ledgeriana. On en déduit que les CI50 relativement faibles en RSSA seraient illusoires. Le Mark III amélioré suffit largement pour un premier criblage des tisanes, d’autant plus que la réalisation RSSA est exigeante.

Impact

Mark III est un test « transférable » dans des universités dans sa version microscopique. Mais nous allons utiliser Mark III avec une détermination de parasitémie par la cytométrie.